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Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, I.djvu/745

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dée qu’en trois ans, de sorte que les contribuables sont, comme nous l’avons déjà observé, toujours exposés aux poursuites de trois collecteurs à la fois.

Dans cet état des choses, les contribuables n’en payent pas moins chaque année, quoique sur différents exercices, une somme à peu près égale à la totalité des impositions de l’année courante ; et l’on sent au premier coup d’œil que s’il en était autrement, les arrérages grossiraient sans cesse au point de mettre les peuples absolument hors d’état d’y satisfaire jamais. Cependant, l’effet de cette surcharge d’impositions, dont nous nous plaignons depuis si longtemps, et que nous croyons avoir évidemment prouvée en 1766, est tel que, pour peu qu’il survienne un accroissement d’impositions extraordinaires, pour peu que la province essuie quelques malheurs particuliers, il devient impossible de payer dans l’année une somme égale à l’imposition courante, et que les arrérages n’augmentent nécessairement. En effet, nous avions observé à M. le contrôleur-général que la province avait payé, en 1770, environ 900,000 fr. de moins qu’en 1769, et nous lui avions fait considérer en même temps que cette somme cadrait assez exactement avec le calcul des sommes qu’il avait été nécessaire de remettre à la province, tant pour exempter d’impositions les journaliers et les petits propriétaires qu’on avait été obligé de mettre à la charité publique, que pour soulager d’une manière vraiment efficace les paroisses de la Montagne, et pour ne pas faire supporter aux autres contribuables de la province une charge plus considérable après la disette de 1770, que celle qu’ils supportaient en 1769. Nous ajoutions que l’accord de ces deux résultats méritait d’autant plus son attention, que cet accord n’avait été aucunement combiné, et que nous avions achevé le calcul des soulagements dont la province avait besoin avant d’avoir pensé à comparer les recouvrements de 1770 avec ceux de 1769.

Cette considération, qui ne paraît pas avoir autant frappé le Conseil l’année dernière qu’elle nous semblait le mériter, est trop importante pour que nous ne cherchions point à la développer de nouveau, et à la présenter encore sous un jour qui montre la nécessité d’y avoir égard.

Nous avons fait continuer, d’année en année, le relevé des recouvrements annuels que nous avions déjà adressé à M. de Laverdy en 1767, et nous avons comparé le recouvrement effectif de chaque