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Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, I.djvu/98

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chait, sans compter ses remises sur le montant des droits, 12 p. 100 d’intérêt annuel. Et quoique l’avance fût remboursable par portions successives et à des époques déterminées, l’intérêt ne décroissait pas à mesure que s’avançait la libération de l’État ; de telle sorte qu’on a calculé qu’il devait arriver un moment où les régisseurs eussent tiré 96 p. 100 d’intérêt de leurs capitaux. Turgot rompit ce marché, institua une régie nouvelle, augmenta son travail, en obtint un fonds d’avance de 12 millions, et le paya sur un pied moins exorbitant.

Le bail du domaine réel, passé aussi sous le ministère de Terray, était encore plus scandaleux. Les fermiers avaient obtenu, pour l’espace de trente ans, au prix de 1,564,600 livres, payables chaque année par avance à partir du 1er octobre 1774, 1o la jouissance de terres précédemment louées 1,116,164 livres, par baux particuliers qui expiraient au mois de décembre de la même année 1774 ; 2o celle de toutes les terres vaines et vagues, à défricher ou à dessécher, dont l’État pourrait être propriétaire ; 3o enfin la faculté de rentrer dans tous les domaines qui seraient reconnus appartenir au gouvernement. Par cette dernière clause, l’ex-contrôleur-général avait concédé un droit dont il ne connaissait même pas l’étendue ; et l’on peut juger des bénéfices que leur ensemble aurait procurés aux traitants, par ce seul fait que, dès l’année 1775, les sous-baux de six ou de neuf ans, des terres dont il s’agit, égalèrent le prix total qu’ils en avaient donné. Turgot cassa encore le bail du domaine, organisa une régie pour neuf ans, et en obtint six millions d’avances, à des conditions aussi bonnes que celles stipulées avec la régie des hypothèques.

Le bail des poudres et salpêtres, renouvelé également sous l’administration de Terray, n’était pas moins onéreux à l’État que le précédent. La seule condition imposée à la compagnie qui jouissait du monopole de la fabrication et de la vente de ces matières, consistait à fournir chaque année un million pesant de livres de poudre aux arsenaux de la guerre et de la marine. Les fermiers livrant cette poudre à l’État sur le pied de six sous la livre, tandis que le prix de revient s’élevait pour