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Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, II.djvu/174

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Prélever une portion des profits qui lui reviendront si le succès est heureux, c’est, dans le cas où la balance serait égale entre la crainte et l’espérance, la faire pencher du côté de la crainte ; c’est diminuer un encouragement qu’il faut au contraire augmenter, si l’État a intérêt que les mines qu’il possède soient exploitées : or, c’est ce dont personne ne doute. Les productions des mines sont certainement une richesse de plus pour la nation et une dépense de moins, puisqu’il faudrait qu’elle achetât de l’étranger de quoi subvenir à tous ses besoins en ce genre. Il serait donc contraire aux vrais principes en matière d’imposition, de charger l’exploitation des mines d’aucune taxe : l’intérêt de l’État, et par conséquent celui du roi, demandent qu’elle soit entièrement affranchie.

J’ajouterai que, quand même on voudrait laisser subsister une imposition sur cet objet, celle du dixième des produits serait très-inégale et souvent excessive. Les dépenses de l’exploitation sont souvent si considérables, que le dixième du produit emporterait la totalité du profit ; alors l’imposition équivaudrait à une défense d’exploiter la mine. En général, les dépenses d’exploitation sont si variables, si difficiles à prévoir, ont des proportions si différentes avec le produit réel des différentes mines, qu’une portion déterminée du produit, sans aucune déduction de dépenses, formerait nécessairement une taxe très-inégale, et d’autant plus injuste qu’elle augmenterait à raison de la diminution des profits. Cette injustice existerait déjà si ce dixième se prélevait sur la mine brute, sans avoir égard aux dépenses de l’extraction ; mais elle est encore bien augmentée par la disposition de quelques anciennes lois qui règlent que ce dixième sera pris sur les matières fondues et affinées, et qui par conséquent chargent encore l’entrepreneur de la dépense et des risques de la fonte.

J’en ai peut-être trop dit sur cette dernière question ; car, autant que je puis en juger, les personnes qui sont en France à la tête de l’administration sont assez convaincues que le roi a plus d’intérêt à encourager l’extraction des mines qu’à la charger d’un impôt.

Conclusion générale. — Tout ce que les lois positives ont à faire sur la matière de l’exploitation des mines, pour assurer le plus grand avantage possible de l’État, se réduit à ne rien retrancher et à ne rien ajouter à ce qu’établit la seule équité naturelle.

On ose prédire que, sur quelque matière que ce soit, l’étude appro-