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Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, II.djvu/225

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Nous avons reconnu que, dans des temps malheureux de troubles et de guerres civiles, dans des siècles où, le commerce n’existant point encore, ses principes ne pouvaient être connus, les rois nos prédécesseurs, Charles VI, Charles IX, Henri III, ont donné quelques ordonnances sur cette matière ; que, sans le concours de l’autorité royale, plusieurs règlements de police s’y sont joints pour former le corps d’une législation équivalente à une prohibition d’apporter des grains à Paris ; que l’habitude et le préjugé l’ont cependant maintenue, et quelquefois confirmée ; que, même dans des temps où le gouvernement commençait à porter sur cet objet une attention plus éclairée, on a réclamé fortement pour la conservation de cette police ; qu’elle a été réservée, comme si elle eût été la sauvegarde de la facilité des subsistances.

Que des officiers créés en différents temps, à la halle et sur les ports, étaient chargés de veiller à son exécution, et cependant autorisés à percevoir des droits dont la vente des grains demeure grevée.

Qu’enfin, depuis peu d’années, il a été mis un impôt sur ce commerce, pour la construction d’une halle et d’une gare.

Ainsi, en réunissant les différents effets de la police destinée à assurer les subsistances dans Paris, il demeure constant que non-seulement des droits de différente nature augmentent le prix des grains et des farines, mais que les règlements en empêchent l’abondance, et que toutes les parties de cette législation sont tellement contradictoires entre elles et contraires à leur objet, que l’indispensable nécessité de la réformer se trouve démontrée par le plus simple exposé des règlements et de leurs effets.

Une ordonnance du mois de février 1415, renouvelée par un arrêt du 19 août 1661, défend de serrer, ou d’ôter des sacs, les blés ou les farines arrivant par terre ; de débarquer, de mettre en greniers ou en magasins, ou même sous des bannes, les mêmes denrées arrivées par eau ; en sorte que, suivant les règlements, elles doivent demeurer exposées à l’air, à la pluie, et à l’humidité continue qui les corrompt.

Le même arrêt de 1661 défend de faire aucun amas de grains, et d’en laisser séjourner dans les lieux de l’achat, ou sur les ports du chargement, ou sur les routes par lesquelles ils doivent arriver.

Ces règlements réunis interdisent à la ville de Paris tout moyen