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Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, II.djvu/825

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de Virgile. J’aurais été infiniment flatté que vous eussiez daigné m’en dire votre avis ; votre approbation eût été pour moi le plus grand des encouragements. Je crains bien que votre silence ne soit l’arrêt de ma condamnation. L’emploi de votre temps est si précieux pour votre gloire, pour le plaisir et l’instruction des hommes, que vous ne devez pas en perdre à discuter des écrits médiocres ; et, malgré l’amour-propre attaché à la profession d’écrivain, l’idée que j’ai de la sûreté de votre goût est telle, que je suis bien prêt à souscrire à votre jugement. Quoi qu’il en soit, comme il se pourrait absolument que le paquet eût été perdu, j’ose vous prier de me tirer de cette incertitude, ne fût-ce qu’en me le renvoyant tel que vous l’avez reçu, et sans y faire aucune autre réponse. J’entendrai votre silence, et je saurai renoncer à un travail que vous aurez jugé sans mérite. Ayez la bonté d’adresser toujours le paquet à M. l’abbé de L’Aage des Bournais, sous une double enveloppe, à M. Caillard, secrétaire de M. d’Arget, à l’École militaire ; il se chargera de me le faire passer.

J’ai l’honneur d’être, avec un attachement fondé sur l’admiration la plus profonde, monsieur, votre très-humble et très-obéissant serviteur,

L’abbé de L’Aage des Bournais.

Lettre IV. — Au même. (À Limoges, le 10 juillet 1770.)

Je ne sais, mon cher Caillard, si vous avez reçu une lettre[1] que je vous ai adressée à Dijon le 22 juin, à laquelle était joint un projet de lettre de l’abbé de L’Aage. Depuis ce temps, l’abbé a reçu la réponse à sa première lettre, je vous en envoie copie. Je ne puis comprendre comment on a pu goûter la traduction, et en faire d’aussi grands éloges, sans s’être aperçu que ce n’était pas une simple prose. On ne s’explique point sur cet article, qui est cependant l’objet le plus intéressant. L’abbé de L’Aage veut insister, et il a récrit la lettre dont voici le projet : il vous prie instamment de la faire parvenir à son adresse, en la mettant à la poste de Gênes, si vous êtes encore à temps ; si vous êtes déjà à Parme, il faut la faire mettre à la poste dans quelque ville des États du roi de Sardaigne, afin de mieux dépayser. Si la lettre que vous avez reçue à Dijon n’est pas partie, il faut la supprimer.

Je vous faisais, dans la lettre que je vous écrivais à Dijon, quelques exhortations que je ne vous répète point, ne doutant pas que cette lettre ne vous soit parvenue ou ne vous parvienne. Je n’ai pas besoin de vous dire qu’elles n’ont été dictées que par l’intérêt que je prends à votre bonheur.

Savez-vous le nouveau désagrément qu’essuie le pauvre abbé Morellet, à qui M. le contrôleur-général[2] ne permet pas de publier sa réponse à l’abbé Galiani. Cela est bien étrange.

L’abbé me mande que Mme Caillard est placée en Pologne. Je suis charmé que par cet arrangement elle puisse se passer de vous. Cela vous permettra de mettre vos affaires en ordre.

Le temps qu’il fait ici est déplorable, il retarde la moisson et fait tout craindre pour l’année prochaine. J’irai pourtant, à ce que j’espère, passer le mois prochain à Paris. — Adieu. Je vous souhaite une bonne santé et tout le bonheur que vous pouvez désirer.

  1. La précédente.
  2. L’abbé Terray. — Voyez, plus haut, les lettres VIII et IV, pages 800 et 801.