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Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, II.djvu/99

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pendant l’hiver de 1770 à 1771, achats que la baisse survenue dans les prix leur a rendus très-préjudiciables. Il convient de discuter successivement chacun de ces titres.

Je crois d’abord pouvoir écarter la demande fondée sur la perte d’un bateau de grains en remontant la Dordogne au printemps de 1770. Certainement, le commerce que faisaient à cet égard les sieurs Malepeyre, Jauge et Dupuy, a été infiniment utile à la partie du bas Limousin, et je leur ai rendu à ce sujet, auprès de vous, le témoignage qu’ils ont mérité. Mais, quoique leur conduite en général les ait rendus très-favorables, je ne puis croire qu’il en résulte un titre en leur faveur pour demander d’être indemnisés des pertes qu’ils ont faites dans un commerce entrepris volontairement et à leurs risques, périls et fortunes, sans aucun engagement de la part de l’administration d’entrer dans les pertes qu’ils pourraient faire. La maxime Res perit domino me paraît entièrement applicable à ce premier objet de demande.

L’indemnité réclamée sur la perte de la cargaison condamnée par la sentence des juges de police d’Angoulême, du 20 août 1770, me paraît mériter beaucoup plus de faveur.

Pour vous mettre en état de décider sur cette demande, il est nécessaire de remonter à l’origine de l’envoi de cette cargaison à Angoulême.

Les dernières cargaisons achetées à Dantzick pour l’approvisionnement de Limoges ayant été retardées par différents obstacles, je craignis beaucoup que le grain ne manquât tout à fait aux approches de la récolte. Je savais que les sieurs Malepeyre et Jauge avaient en mer un vaisseau chargé de seigle, venant de Stettin, et qui devait relâcher aux rades de La Rochelle pour se rendre de là soit à Nantes, soit à Bordeaux, suivant les ordres que le capitaine devait recevoir, et suivant que les intéressés croiraient y trouver plus d’avantages. Je proposai au sieur Jauge de mander à son correspondant de La Rochelle de tenir ce navire aux ordres des négociants de Limoges chargés de l’approvisionnement, afin de le faire passer à Charente, d’où la charge serait envoyée par gabarre à Angoulême et transportée ensuite à Limoges. Le sieur Jauge se rendit à mes propositions. Les négociants de Limoges écrivirent en conséquence au correspondant du sieur Jauge, à La Rochelle, de faire passer cette cargaison à Angoulême pour leur compte. Ils ajoutaient cependant