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Page:Valéry - Regards sur le monde actuel, 1931.djvu/161

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conséquences les plus rigoureuses et les plus excessives, qu’il appartenait de développer ces inventions jusqu’à l’extrême de leurs effets. Notre affaire n’est-elle point de rendre l’univers trop petit pour nos mouvements, et d’accabler notre esprit, non plus tant par l’infinité indistincte de ce qu’il ignore que par la quantité actuelle de tout ce qu’il pourrait et ne pourra jamais savoir ?

Il nous faut aussi que les choses soient toujours plus intenses, plus rapides, plus précises, plus concentrées, plus surprenantes. Le nouveau, qui est cependant le périssable par essence, est pour nous une qualité si éminente, que son absence nous corrompt toutes les autres et que sa présence les remplace. À peine de nullité, de mépris et d’ennui ; nous nous contraignons d’être toujours plus avancés dans les arts, dans les mœurs, dans la politique et dans les idées, et nous sommes formés à ne plus priser que l’étonnement et