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Page:Valéry - Regards sur le monde actuel, 1931.djvu/210

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vait spéculer sur les bénéfices d’une sanglante entreprise, doit admettre aujourd’hui qu’elle ne peut que s’égarer dans ses prévisions. C’est qu’il ne peut plus être de conflits localisés, de duels circonscrits, de systèmes belligérants fermés. Celui qui entre en guerre ne peut plus prévoir contre qui, avec qui, il l’achèvera. Il s’engage dans une aventure incalculable, contre des forces indéterminées, pour un temps indéfini. Que si même l’issue lui est favorable, à peine la victoire saisie, il devra en disputer les fruits avec le reste du monde, et subir peut-être la loi de ceux qui n’auront pas combattu. Ce dont il est assuré, ce sont des pertes immenses en vies humaines et en biens, qu’il devra éprouver sans compensation, car dans une époque dont les puissants moyens de production se changent en quelques jours en puissants moyens de destruction, dans un siècle où chaque découverte, chaque invention vient menacer