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Page:Van Dooren - Anthologie des poètes français, 1921.djvu/678

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POÈTES FRANÇAIS

Dans la cour, l’averse clapotante détonne,
Le chêneau engorgé sanglote monotone
Et j’entends, mélangé au bruit de l’eau qui coule,
Le caquetage sourd, en la grange obscure, des poules
Et du coq. Le bétail respire, s’ébrouant ;
Et par-dessus cela la voix sombre du vent.

Le vent des heures s’époumonne,
Frappe lourdement à la vitre.
Je l’écoute, à côté du chat qui ronronne
Assise, et j’écoute aussi chanter la marmite ;
Près des cendres couleur de rose.
Le chat et la marmite causent.

Aux solives pendent la serpe et des tamis,
Des oignons d’or et des mais
Et l’étoupe en écheveaux blonds ;
Et, pour l’ornement des rayons,
On a posé sur la crédence,
Entre chaque plat de faïence.
Où des roses et des tulipes fleuronnent,
Des pommes d’amour.

Comme elle est douce aux rêveurs la cuisine.
Avec, son âtre aux flammes incarnadines,
Accrochant aux croisées de rosâtres courtines
Et par qui, dans l’ombre, les flancs du pétrin
Luisent. Sur l’évier est un seau de bois
Et son bassin de cuivre, où l’on boit

L’eau glacée du puits ; et derrière la platine
Le lait crème dans l^es frustes terrines.

(Les Pastorales.)

Victor-Emile Michelet.
Nantes, 1861.

Œuvres poétiques : La Porte d’Or (1902). — L’Espoir Merveilleux (1908). Les Portes d’Airain, suite de 50 Contes ou Poèmes en prose (1920j. — Théâtre en vers. (’)

Poète, littérateur, critique. Apparenté, dit-on, à la famille du grand historien ; venu à dix-neuf ans à Paris, après avoir débuté, étant encore lycéen, au Parnasse, qui publia ses premiers vers, se mêla très activement au mou rement littéraire et artistique et fréquenta les derniers romantiques, tels que Barbey d’Aurevilly, Villiers de l’Isle-Adam, Arsène Houssaye ; et des parnassien ?, comme Théodore de Banville, Leconte de Lisle. Successivement, secrétaire à la rédaction de ^ Jeune France (1884-1888) ; puis, de la Grande Revue (1888-1889) ; directeur de la revue P.ycAé ( 1890-1891) et de Y Humanité Nouvelle (1899-1903), etc.

Esprit curieux de l’au delà, très averti de tout le mouvement philosophique et occultiste contemporain, s’intéressant également aux manifestaliona artistiques et aux questions sociales d’à présent ; <’il semble, écrit l’un de ses commentateurs, M, Henry Cormeau, que V.-E. Michelet cherche un renouveau d’expression comme s’il aspirait à une renaissance perpétuelle de l’ingénuité. « Avoir des yeux nouveaux pour contempler les choses », dit-il. Il prend les

(1) En prose, Michelet a écrit : L’Esote’rhme dans l’Art (1800) ; Manfra, peintre et graveur (1908) L’Amour et la Magie (1909) ; Villiers de l’/sle-Adam 0910) : Figures d’Evocateurs (1912).

Comme conteur on lui doit : Contes aventureux (1900) ; Contes surhumains (1906) ; Le Cœur d’Alcyone, histoire d’un astre (1910) ; Les Portes d’Airain (1920).