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Page:Vandervelde - La Belgique et le Congo, le passé, le présent, l’avenir.djvu/223

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Plus de sept mille hommes, à cette époque, se trouvaient sur les chantiers. Les désertions, très fréquentes à l’origine, se faisaient de plus eu plus rares.

Néanmoins — dit M. Goffin[1] — la production restait faible ; la contrainte indirecte qui consistait à priver de la ration, du salaire et du logement, les hommes ne travaillant pas, pouvait amener les noirs sur les chantiers, mais ne suffisait pas à leur faire donner un rendement raisonnable. C’est alors que fut généralisé le travail à primes, qui n’avait été employé jusque-là qu’avec certaines équipes d’élite et dans certains cas spéciaux : les hommes présents sur les chantiers continuaient à recevoir le salaire fixé au contrat d’engagement, et, de plus, il était attribué à chaque brigade une prime calculée d’après l’importance de la tranchée et la difficulté du travail, et inversement proportionnelle au délai d’exécution accepté par la brigade. Si ce délai était dépassé, la prime était supprimée. C’était le travail à la tâche avec minimum de salaire.

Le résultat fut immédiat. La production moyenne journalière, transport de terres compris, fut doublée en ce qui concerne les travailleurs sénégalais, les meilleurs de la Compagnie : celle de l’ensemble du personnel de l’infrastructure fut augmentée de plus de moitié, passant de 0,841 à 1,377 mètre cube. Dans ces conditions, les frais généraux de la Compagnie, étant répartis sur un plus grand nombre de kilomètres, le prix de revient kilométrique fut réduit, en même temps que les frais de surveillance devenaient beaucoup moins considérables.

Depuis, les mêmes méthodes ont été appliquées à l’exploitation. Peu à peu, les ouvriers de la côte que l’on rapatrie, ne sont pas remplacés. Le recrutement se fait sur place. Le personnel, qui se compose d’environ 2 300 hommes, compte plus de 2 000 Bacongos et ces derniers, convenablement nourris, et payés, en moyenne, deux fois plus que les travailleurs des postes de l’État, sont la preuve vivante que, si les problèmes de main-d’œuvre en Afrique sont difficiles, ils ne sont pas insolubles.

  1. Goffin. Le chemin de fer du Congo, p. 66.