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Page:Vandervelde - La Belgique et le Congo, le passé, le présent, l’avenir.djvu/225

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deront pas à venir, de plus en plus nombreux, offrir leur travail contre de l’argent.

Ainsi que le faisait observer M. Wangermée, dans une note adressée en 1908 au Groupe d’études coloniales de l’Institut Solvay[1], l’importance d’un bon paiement est reconnue par la majeure partie de ceux qui ont eu à faire travailler le noir, autrement que par la contrainte. C’est, par exemple, ce qu’écrivait, en 1906, à son représentant au Katanga, M. Williams, qui a joué un si grand rôle dans la mise en train des travaux miniers du Katanga et de la Rhodésie :

Vous devez bien comprendre que l’indigène d’aucun pays, noir ou blanc, ne considère le travail minier comme un agrément, et, pour son agrément, l’indigène d’Afrique ne travaille pas du tout. Son occupation consiste à faire la guerre, défendre sa maison, sa femme, ses animaux contre les attaques ; sa femme est le vrai travailleur, et nous devons l’amener, lui, au travail.

Plus vous le paierez en or et lui assurerez des magasins remplis de toutes sortes de beaux effets, de perles, de pots, de casseroles, de confitures (qu’il adore), de couteaux, etc., plus il poussera d’autres indigènes à venir gagner de l’argent, quand, chargé des produits de son travail, il rentrera au village d’où il était parti nu et pauvre.

Il représente, vraiment, le pauvre mendiant de notre pays qui quitte un milieu de pauvreté et de lutte, et revient, comme une sorte de richard, déposer son gain aux pieds de ses parents, de sa femme et de son amoureuse ; le résultat net est que toutes les autres femmes deviennent jalouses quand elles voient les dames amies du richard ornées de toutes les belles choses qu’il leur a données, et alors, tous les hommes sont tenus de faire de même, et ces mines deviendront populaires…

En somme, au témoignage de gens dont il est difficile de ne pas dire que ce sont des gens pratiques, il est possible, presque partout, de trouver des ouvriers indigènes, pourvu que l’on s’arme de patience, que l’on y mette du doigté et que l’on n’hésite pas à reconnaître ce fait essentiel : dans les pays neufs, le salariat n’est possible qu’à la condition de procu-

  1. Groupe d’études coloniales de l’Institut Solvay. Le régime foncier du Congo belge, 1909.