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Page:Variétés Tome II.djvu/124

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petite Margot, qui, grace à ses manières affables et prevenantes pour tout le monde, avoit mérité le nom de ma Mie, fit voir une curiosité sans exemple pour les romans, et surtout pour les grandes histoires où il etoit parlé d’enlèvement de filles et de femmes. J’oubliois à vous dire qu’on avoit predit à sa mère qu’elle seroit enlevée plus d’une fois en sa vie. Sa mère voulut la stiler dans les fonctions de son negoce ; mais ma Mie Margot, qui n’avoit nulle inclination pour la tripe, sortit un jour de la maison paternelle, et arriva à Paris entre chien et loup ; elle se logea dans le faubourg Saint-Germain, et, ayant eu l’indiscretion d’y decliner son nom, ce fut à qui publieroit le premier son arrivée. D’abord les ecosseuses de pois ne repetèrent autre chose au coin des rues ; les polissons furent leur echo : bientôt toute la ville en fut imbue.

Le penchant qu’elle avoit à devenir publique, et qui se manifestoit en elle de jour en jour, la porta bien vite à ne plus faire mystère de son séjour à Paris. Elle s’y fit voir, et la foire la vit avec plaisir et avec profit ; les preaux retentirent de son nom ; Polichinelle la chanta, et les theâtres la celebrèrent


dans des vers que cite La Mésengère à l’article Tablier de son Dictionnaire des proverbes :

Quelle grâce, en effet, quels charmes singuliers
Nos dames présentoient avec leurs grands paniers !
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Sur une base énorme, obélisque nouveau,
Dans sa gaine, le corps s’allongeoit en fuseau,
Et serré fortement, afin d’être plus libre,
Présentoit sur sa pointe un coue en équilibre.