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Page:Vaudere - Les Demi sexes.pdf/23

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LES DEMI-SEXES

plus en plus, répondait gracieusement aux questions, qu’on lui adressait, sans hésiter jamais sur ce qu’elle devait dire, son opinion, dans le monde, étant toujours prête à l’avance. Mais, elle s’aperçut que la nuit venait, et elle sonna pour les lampes. Quand le valet de chambre se fut retiré, elle se mêla encore à la causerie qui coulait toujours comme un ruisseau de guimauve, tandis que son regard anxieux surveillait l’entrée des grands salons déserts.

Pour un observateur superficiel, elle semblait sage et calme ; son esprit correct, sans surprise, avait l’air d’être aligné comme un jardin français, avec de belles allées droites et des corbeilles de fleurs choisies. Sa raison paraissait fine, discrète, sûre et légèrement ironique, comme il sied à une fille de bonne maison. Les mères la citaient en exemple, les jeunes gens tournaient autour d’elle avec un vif intérêt que sa froideur maintenait dans les limites d’un flirt respectueux. La baronne de Luzac, impotente et paresseuse, lui laissait la gérance de sa grosse fortune qu’elle faisait du reste valoir comme un homme d’affaires. Orpheline toute jeune, Camille avait appris à se passer de conseils, de