Aller au contenu

Page:Vaudere - Les Demi sexes.pdf/36

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
27
LES DEMI-SEXES

licieux. Décidément, il n’était pas le Lovelace de fatuité que sont plus ou moins tous les très jeunes gens, qui se croient irrésistibles parce qu’ils ont moissonné des gerbes de baisers sur les bouches des femmes de chambre de leurs mères. Il avait encore l’épouvante de la volupté et n’osait même s’avouer son extase. D’ailleurs, Camille de Luzac n’était pas de celles que l’on pouvait désirer en dehors du mariage, et il s’estimait trop modeste et trop obscur pour oser lever ses yeux jusqu’à elle.

Talberg, silencieux et préoccupé, paraissait depuis quelque temps, s’alarmer des chuchotements de Nina et de Camille ; comme le domestique faisait le tour de la table en versant du vin de Johannisberg, il se leva et porta un toast au prochain mariage de mademoiselle de Luzac. Tout le monde s’inclina vers la jeune fille qui dissimula une moue de mécontentement, et Julien, un peu gris, laissa tomber son verre qui se brisa sur la nappe.

Il avait cru sentir le genou de Camille frôler le sien et l’émotion avait été si forte qu’il s’était mis à trembler. Un sang plus vif courut tout à coup dans ses veines, une espérance infinie lui vint. Jamais il n’avait rien éprouvé de pareil. Et, comme il tournait la tête, il