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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/250

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— 1814 —

troupes de Blücher, qui bientôt atteignit Laon après s’être éloigné de la vallée de l’Aisne de plus de vingt-cinq lieues. Ce général ne se serait pas arrêté dans cette ville et aurait probablement fui jusqu’en Belgique, si, par un hasard qui se reproduisit souvent dans cette guerre de quelques semaines, de nouvelles forces, — une partie de l’armée de Bernadotte, — ne l’avaient rejoint au moment où son arrière-garde était chassée de Craonne. Ce nouveau secours le rendait plus fort que jamais : il commandait encore une fois à plus de 100,000 soldats. Malgré cette immense supériorité numérique des Prussiens, Napoléon résolut de les déloger de leur nouvelle position, et, le 8 mars au soir, il fit ses dispositions pour les attaquer le lendemain.

Les approches de Laon, dans la direction suivie par nos troupes, étaient couvertes par le village d’Étrouvelle, que défendaient 7 à 8,000 soldats russes d’élite placés sous les ordres du général Woronzoff. Une chaussée longue d’une lieue, espèce de défilé tracé à travers des marais, conduisait à ce village, dont la possession était indispensable pour aborder Blücher et ses troupes. Le maréchal Ney, chargé de la poursuite des Russes depuis Craonne, avait vainement essayé, dans la journée, d’arriver jusqu’aux soldats de Woronzoff : tous ses efforts pour approcher d’Étrouvelle s’étaient arrêtés devant une forte batterie d’artillerie placée en avant du village, et dont le feu enfilait la chaussée. Dans la nuit, l’Empereur donna, à son premier officier d’ordonnance, le colonel Gourgaud, l’ordre de faire disparaître cet obstacle. Gourgaud prit deux bataillons d’infanterie ainsi que trois escadrons de cavalerie de la vieille garde, et, se jetant dans des chemins de traverse qui couraient sur les parties les plus solides des marais, il tourna ceux-ci, surprit les régiments chargés de défendre le défilé, les chassa de leur position, rendit la chaussée libre, et donna ainsi à nos soldats la facilité de déboucher sur la position des Prussiens.