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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/26

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— 1793 - 1799 —

plusieurs de ses membres et l’improbité de quelques autres l’avaient fait tomber, le Directoire aurait peut-être manqué de la force nécessaire pour aller plus avant, s’il n’avait été soutenu par les Adresses que la lecture des journaux et les bruits d’une contre-révolution prochaine dictaient aux différentes armées de la République. Ces Adresses, empreintes du plus ardent patriotisme, protestaient avec une rare violence contre les discours des membres royalistes des Conseils ; les soldats y adjuraient le Directoire de se délivrer de ses adversaires ; ils y appelaient la vengeance nationale sur les partisans de la Royauté, sur les amis de l’Étranger, et annonçaient la résolution de marcher, au besoin, sur Paris. L’Adresse de l’Armée d’Italie, apportée par Augereau, était surtout remarquable par sa véhémence ; et, fait plus grave, le jeune chef de cette armée, dont les victoires étonnaient alors l’Europe et tenaient la France entière attentive, Bonaparte, ne s’était pas borné à approuver cette manifestation des troupes sous ses ordres, il l’avait appuyée par un ordre du jour où se trouvait ce passage : « Soldats, je le sais, votre cœur est plein d’angoisses sur les malheurs de la patrie ; mais, si les menées de l’Étranger pouvaient l’emporter, nous volerions du sommet des Alpes, avec la rapidité de l’aigle, pour défendre cette cause qui nous a déjà coûté tant de sang ! »

Un tel langage permettait l’audace aux trois Directeurs. La Constitution exigeait un vote des Conseils pour que même un régiment pût approcher de Paris à une distance moindre de douze lieues. Barras et ses deux collègues n’hésitèrent pas à violer cette disposition ; ils enjoignirent à Augereau de franchir la limite constitutionnelle. Avertis, par la marche de ce général et de ses troupes, que les trois Directeurs connaissaient le complot et s’apprêtaient à engager la lutte, Pichegru et ses amis ne voulurent pas être prévenus et se décidèrent à brusquer l’événement. Arrêter Barras, Laréveillère et Rewbell, ainsi que les représentants les plus dévoués aux principes de