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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/294

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— 1814 —

qui décida les souverains à marcher une dernière fois sur Paris ; encore prenaient-ils cette direction, moins dans l’espérance d’emporter la capitale de l’Empire que pour se frayer une route de retraite par la Belgique. Depuis le milieu de février jusqu’au 31 mars, époque de confusion politique, de pêle-mêle et de surprises militaires, ce fut l’imprévu qui conduisit les hommes et la plupart des événements.

À la vérité, M. de Vitrolles avait hardiment promis le concours de MM. de Talleyrand, de Dalberg, de Pradt et Louis[1]. Tous les quatre, après le triomphe des Alliés, ont réclamé le bénéfice de cette déclaration de noms, contre laquelle ils auraient certainement protesté avec toute la chaleur de l’in-

  1. L’abbé de Pradt, émigré rentré, avait été comblé des bienfaits de l’Empereur, dont il fut longtemps un des adulateurs les plus exagérés. Attaché d’abord à la chapelle impériale, en qualité d’aumônier, il prenait, à cette époque, le titre passablement étrange d’aumônier du dieu Mars. Promu ensuite à l’évêché de Poitiers, il ne tarda pas à solliciter le siège archiépiscopal de Malines, que Napoléon lui donna malgré l’opposition de tout le clergé belge et malgré les répugnances du pape lui-même.
    L’abbé Louis, ancien conseiller clerc au parlement de Paris, avait été fait baron par l’Empereur et nommé par lui administrateur du Trésor public. C’est en cette dernière qualité que, présentant au Corps législatif un projet de loi sur la vente des biens des communes, il disait à cette Assemblée :
    « Si quelque chose pouvait ajouter à la reconnaissance des Français envers le restaurateur de la monarchie, ne serait-ce pas cet ordre invariable, cette économie sévère portée dans les moindres détails de l’administration ? Rien n’échappe à la vigilance de l’Empereur ; rien de trop petit pour l’occuper lorsqu’il en peut résulter du bien. Nous le voyons, comme Charlemagne, ordonner la vente des herbes inutiles de ses jardins, lorsque sa main distribue à ses peuples les richesses des nations vaincues. Si un homme du siècle des Médicis ou du siècle de Louis XIV revenait sur la terre, et qu’à la vue de tant de merveilles il demandât combien de règnes glorieux, combien de siècles de paix il a fallu pour les produire, vous répondriez qu’il a suffi de douze années de guerre et d’un seul homme. »
    C’est le 11 mars 1813, moins de dix mois avant l’entrée des Alliés en France, que M. Louis tenait ce langage.
    Quant à M. de Dalberg, baron d’origine allemande et duc de création impériale, la générosité de l’Empereur envers lui avait été sans bornes. Lorsque Napoléon, dans sa munificence impériale, éleva l’électorat de Bavière au rang de royaume, un des articles secrets de l’acte de création stipulait en faveur de M. de Dalberg, pour des services dont nous ignorons la nature, un présent de 4 millions, qui lui furent intégralement payés par le nouveau monarque.