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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/94

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— 1800 - 1807 —

rapide exécution du jugement. Cet officier supérieur, après avoir quitté Murat, se mit en chemin pour Vincennes ; il avait l’ordre de prendre, en passant près la place de la Bastille, un détachement de la gendarmerie d’élite casernée dans l’ancien couvent des Célestins. La nuit était venue depuis longtemps ; il était alors près de onze heures ; tous les gendarmes se trouvaient couchés. Le capitaine d’Autencourt, adjudant-major de service, en fit lever un certain nombre ; on en choisit vingt-cinq que l’on munit de cartouches ; quelques-uns durent, en outre, porter des pelles et des pioches. Ce détachement, conduit par Savary, atteignit la forteresse de Vincennes au moment où y arrivaient, de leur côté, les membres du conseil de guerre. Ces officiers ignoraient les motifs de l’étrange convocation qui les appelait ainsi, au milieu de la nuit, à plus d’une lieue des barrières ; ils ne les apprirent que par la lecture de quelques pièces déposées sur le bureau de la salle où on les installa, et dont leur donna communication le général Hullin, désigné président du conseil par sa lettre de service. Ils se constituèrent sur-le-champ, et firent amener devant eux le jeune prince. L’attitude de cet infortuné était calme : interrogé sur son nom et sur les actes de sa vie, il répondit avec fermeté au petit nombre de questions qui lui furent adressées. D’abord, il repoussa avec l’accent de l’indignation la plus vive toute pensée de participation au complot qui s’instruisait en ce moment devant le tribunal criminel de la Seine ; il mit ensuite une noble et courageuse simplicité à reconnaître qu’il avait porté les armes contre la France, et que, depuis qu’il les avait posées, il était allé à Strasbourg : « Je ne m’y suis pas rendu dans une pensée de conjuration, ajoutait-il ; absent de France depuis quatorze ans, et retiré à quelques lieues seulement de sa frontière, je n’ai pu résister au désir de respirer l’air de la patrie, de me trouver pendant quelques instants au milieu de compatriotes, de revoir, en un mot, une ville française. Je n’y suis venu que deux ou trois fois, mais sans en-