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Page:Verhaeren - La Multiple Splendeur, 1907.djvu/89

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— Voici qu’il vient vers nous des horizons blafards,
Angleterre, Jersey, Bretagne, Écosse, Irlande,
Où novembre suspend les torpides guirlandes
De ses astres noyés, en de pâles brouillards ;
Il est parti, le vent sans joie et sans lumière :
Comme un aveugle, il erre au loin sur l’océan
Et, dès qu’il touche un cap ou qu’il heurte une pierre,
L’abîme érige un cri géant.

— Printemps, quand tu parais sur les plaines désertes,
Le vent froidit et gerce encor ta beauté verte.

— Voici qu’il vient des longs pays où luit Moscou,
Où le Kremlin et ses dômes en or qui bouge
Mirent et rejettent au ciel les soleils rouges ;
Le vent se cabre ardent, rugueux, terrible et fou,
Mord la steppe, bondit d’Ukraine en Allemagne,
Roule sur la bruyère, avec un bruit d’airain,
Et fait pleurer les légendes, sous les montagnes,
De grotte en grotte, au long du Rhin.