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Page:Verhaeren - Les Flammes hautes, 1917.pdf/51

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Vous étiez doux et lumineux pourtant ;
Et les hivers, et les étés, et les printemps
Ne revêtaient mon vers de leur beauté profonde
Que parce que d’abord, vous seuls, mes deux yeux clairs,
Aviez aimé le sol, les bois, le vent et l’air
Et la splendeur innombrable du monde.

Vous paraissiez alors deux flambeaux de ferveur
Doucement inclinés sur le charme des choses :
Vous étiez à l’affût du secret qui compose
Le dessin d’un rameau ou l’éclat d’une fleur ;
Vous induisiez mon âme à la belle prière
Devant tout ce qui reste ardent, vivace et pur
Et les pois de senteur et les roses trémières
Ornaient, comme un autel, la blancheur de mes murs.

Et vous alliez vers les hommes des autres plaines
Avec un émoi simple et doux
Pour découvrir sous leurs paupières
Le même feu qui s’attisait en vous.