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Page:Verhaeren - Les Flammes hautes, 1917.pdf/65

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Des pays tout entiers sont couverts de travaux
Qui fatiguent le sol des chocs de leurs marteaux.
Les isthmes sont fendus et les mers sont unies.
La machine vers l’impossible s’ingénie
Et, sans crainte des cieux tonnants,
Un jour, comme un insecte énorme et bourdonnant,
Hélice folle, aile tendue,
Elle entre et vole et vire et fuit dans l’étendue.

Elle est là-haut près des astres et monte encor
Dieu sait vers quel exploit, au bout de quel essor !
Ceux qui la voient dans l’air et dans le vent dardée
Changent soudain la vieille et méthodique idée
Qu’ils se faisaient jadis de l’espace et du temps.
La vie en tout leur corps passe, tambour battant,
Vitesse, ardeur, élan, force, courage, audace,
Tout semble en eux brûler et devenir vorace
Et se précipiter vers quels espoirs nouveaux ?
Les cœurs sont transformés ainsi que les cerveaux.
La terre est à celui qui la tient enlacée
Dans le feu circulant des volantes pensées