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Page:Verhaeren - Les Forces tumultueuses, 1902.djvu/110

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La vie ? Il l’étudie en de simples ferments ;
Couche après couche, il a fouillé les sols funèbres,
Il a sondé le fond des mers et des ténèbres,
Il a rebâti tout, avec un tel souci
D’en bien fixer l’assise et les combles et les mortaises,
Qu’il n’est plus rien, sous les grands toits de ses synthèses,
Qui ne soit soutenu et ne soutienne aussi.

Et le tressaut universel des énergies
Règle ce travail neuf, de ses forces surgies,
Aux quatre coins du monde — et la terre et les cieux
Et ceux qui trafiquent au nom de l’or et ceux
Qui ravagent au nom du sang, tous collaborent,
Avec leur haine ou leur amour, au but sacré.
De chaque heure du siècle un prodige s’essore
Et vous les provoquez, chercheurs ! Tout est serré,
Mailles de vie ou de matière entre vos doigts subtils ;
Vos miracles humains illuminent les villes
Et l’inconnu serait dompté et le savoir,
À larges pas géants, aurait rejoint l’espoir,
Si vos cerveaux battus du vent de la conquête
N’usaient à trop penser vos maigres corps d’ascète
Et si vos nerfs tendus toujours et toujours las,
Un jour, tels des cordes, n’éclataient pas.