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Page:Verhaeren - Les Plaines, 1911.djvu/34

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Et brusquement, à l’heure où les campagnes dorment,
Une digue se rompt, on ne sait où, la nuit.

Amas de boue, amas de bruit,
Troncs emportés, souches énormes,
Le flot,
Tel un mont d’eau,
Croule sur les champs noirs jusqu’au prochain village.

Un cri ! et puis soudain des tumultes d’abois,
Et de longues clameurs et des plaintes sauvages.
Puis un arrêt — et la crainte que tout soit mort.

II

Pourtant ceux qui, là-haut, habitent les bruyères,
Et dont le flot bourbeux vient d’épargner le sort,
Sont descendus, le cœur battant, vers la rivière.

Bornes, portes, pavés, poteaux, murs et cloisons,
Tout ce qui fut barrière ou bloc, montagne ou côte,
Gît renversé, tandis que l’eau, toujours plus haute,
Monte sinistrement assiéger les maisons.