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Page:Verhaeren - Les Villes à pignons, 1910.djvu/112

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Et sa parole alors est parole de poids,
Et son geste est suivi aussi loin qu’il les mène.

Si bien que la boisson qu’il vend chaque semaine
Se répand dans la ville, orientant vers lui,
De maison en maison, les cœurs et les esprits ;
Elle est la force lourde et la lente pensée
Dont s’émeuvent encor les cervelles tassées ;
Et tels jours de scrutin où le pouvoir a peur,
Elle est celle qui chauffe, à feu brusque, l’ardeur
Que renferment les fronts joyeux ou taciturnes ;
Et c’est elle toujours qui glisse entre les doigts
Le vote alerte et franc ou le vote sournois
Que chacun jette, avec sa passion, dans l’urne.

En chaque enclos, l’été ; l’hiver, sous chaque toit,
Où la province
S’attable, au jour le jour, et boit,
Le bourguemestre est prince,
Mais le brasseur est roi.