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Page:Verhaeren - Parmi les cendres.djvu/38

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cessionnel, le recueillement du poème ci-dessus. Les voici :

RUBENS

Ton art énorme est tel qu’un débordant jardin
— Feuillages d’or, buissons de sang, taillis de flamme —
D’où surgissent, d’entre les fleurs rouges, tes femmes
Tendant leur corps massif vers les désirs soudains,

Et s’exaltant et se mêlant, larges et blondes,
Au cortège des Ægipans et des Sylvains
Et du compact Silène enflé d’ombre et de vin
Dont les pas inégaux battent le sol du monde,

Ô leurs bouquets de chair, leurs guirlandes de bras,
Leurs flancs fermes et clairs comme de grands fruits lisses
Et le pavois bombé des ventres et des cuisses
Et l’or torrentiel des crins sur leurs dos gras !

Que tu peignes les amazones des légendes
Ou les reines ou les saintes des paradis,
Toutes ont pris leur part de volupté, jadis,
Dans la balourde et formidable sarabande.

Le rut universel que la terre dardait
Du fond de ses forêts au vent du soir pâmées
À ses tisons rôdeurs les avait allumées
En ses taillis profonds ou ses antres secrets.