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Page:Verhaeren - Poèmes, t2, 1896.djvu/177

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les flambeaux noirs

Bois des îles cubant vos larges abatis,
Peaux de fauves, avec, au bout, vos griffes mortes
Lamentables, cornes de buffle et dents d’aurochs
Et reptiles, lamés d’éclair, pendus aux portes.
Ô cet orgueil des vieux déserts, vendu par blocs,
Par tas ; vendu ! ce roux orgueil vaincu de bêtes
Solitaires ; oursons d’ébène et tigres d’or,
Poissons des lacs, aigles des monts, lions des crêtes,
Hurleurs du Sahara, hurleurs du Labrador,
Rois de la force errante, au clair des nuits australes !
Hélas, voici pour vous, voici les pavés noirs,
Les camions brutaux, les caves humorales,
Et les ballots et les barils ; voici les soirs
Du Nord, les mornes soirs, obscurs de leur lumière,
Où pourrissent les chairs mortes du vieux soleil.
Voici Londres cuvant en des brouillards de bière,
Énormément son rêve d’or et son sommeil
Suragité de fièvre et de cauchemars rouges ;
Voici le vieux Londres et son fleuve grandir