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Page:Verhaeren - Poèmes, t3.djvu/131

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les apparus dans mes chemins


Mettez des croix, au long des routes,
Mettez des croix, sur le rempart,
N’importe où, mettez des croix, puisque toutes
Diront le sort d’un espoir mort.
Mon pays las, que domine ma ville,
Avec un fleuve au loin dans le brouillard,
Il est, là-bas, sous ma tristesse, épars,
Avec ses lacs, en flaques d’huile,
Monotones, dans le soir noir.

Oh si la mort pouvait venir !

Mes yeux semblent les eaux d’un marais noir
Qui reflètent toute ma plaine,
Les murs, les tours à bas, le carillon, le soir,
Toute la plaine de ma haine,
Mes yeux, ils sont implorateurs
D’un extrême coin d’or encor,
À l’horizon des orages buccinateurs,
Quand, tout à coup, le carillon a beau sonner,
Son battant noir a beau tanner,
Je n’entends plus ses glas perclus,
Je n’entends plus, je n’entends plus
Rien que là-bas, des voix, soudain, me pardonner…