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Page:Verne - Famille-sans-nom, Hetzel, 1889.djvu/167

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Jean et Joann firent une centaine de pas sur la route ; puis, ils se séparèrent, après avoir donné un dernier regard à Maison-Close, où la mère priait pour ses fils.


X
la ferme de chipogan.


La ferme de Chipogan, située à sept lieues du bourg de Laprairie, dans le comté de ce nom, occupait un léger renflement du sol sur la rive droite d’un petit cours d’eau, tributaire du Saint-Laurent. M. de Vaudreuil possédait là, sur une superficie de quatre à cinq cents acres, une assez belle propriété de rapport, régie par le fermier Thomas Harcher.

En avant de la ferme, du côté du rio, s’étendaient de vastes champs, un damier de prairies verdoyantes, entourées de ces haies à claire-voie, connues dans le Royaume-Uni sous le nom de « fewces ». C’était le triomphe du dessin régulier — saxon ou américain — dans toute sa rigueur géométrique. Des carrés, puis des carrés de barrières encadraient ces belles cultures, qui prospéraient, grâce aux riches éléments d’un humus noirâtre, dont la couche, épaisse de trois à quatre pieds, repose le plus généralement sur un lit de glaise. Telle est à peu près la composition du sol canadien jusqu’aux premières rampes des Laurentides.

Entre ces carrés, cultivés avec un soin minutieux, poussaient diverses sortes de ces céréales que le cultivateur récolte dans les campagnes de la moyenne Europe, le blé, le maïs, le riz, le chanvre, le houblon, le tabac, etc. Là foisonnait aussi ce riz sauvage, improprement appelé « folle avoine », qui se multipliait dans les champs à