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Page:Verne - Famille-sans-nom, Hetzel, 1889.djvu/409

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tardera pas à se taire, car les royaux vont essayer de forcer le passage. Dispersez-vous le long de la berge, à l’abri des roches, et attendez que les bateaux soient à bonne portée. Il ne faut pas que les soldats de Mac Nab débarquent…

— Ils ne débarqueront pas, dit William Clerc, et, s’ils y parvenaient, nous les rejetterions dans le Niagara !

— À notre poste, mes amis ! s’écria Vincent Hodge.

— Je marcherai avec vous, dit M. de Vaudreuil, tant que la force ne me manquera pas…

— Reste ici, Vaudreuil, dit André Farran. Nous serons toujours en communication avec toi…

— Non, mes amis, répondit M. de Vaudreuil. Je serai là où je dois être !… Venez…

— Oui ! venez, patriotes !… Les bateaux ont déjà quitté la rive canadienne ! »

Tous se retournèrent, en entendant ces paroles jetées d’une voix éclatante.

Jean était là. Pendant la nuit précédente, une embarcation l’avait passé sur l’île. Personne ne l’avait reconnu. Après s’être caché du côté qui regardait Chippewa, il avait observé les préparatifs du colonel Mac Nab, sans prendre souci des projectiles qui frappaient la berge. Puis, voyant que les assaillants se disposaient à forcer le passage, il était venu — ouvertement — reprendre sa place parmi ses anciens compagnons.

« Je le savais bien ! » s’écria Lionel.

Clary de Vaudreuil s’était avancée au-devant du jeune patriote, en même temps que Thomas Harcher et ses fils, qui se rangèrent autour de lui.

M. de Vaudreuil offrit la main à Jean…

Jean ne la prit pas.

« Défenseurs de l’île Navy, dit-il, ma mère est morte, accablée par les insultes que vous lui avez fait subir ! Maintenant, il ne reste plus que moi de cette famille vouée à l’horreur et au mépris !