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Page:Verne - Les Naufragés du Jonathan, Hetzel, 1909.djvu/305

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— Moi, dit Dorick. Sans compter que ça ne sera peut-être pas la peine. J’ai une idée, et, si elle est bonne, le Kaw-djer ne sautera pas tout seul. Hartlepool et les hommes qui seront dans le poste sauteront en même temps… Autant d’ennemis en moins que nous aurons le lendemain.

Les trois hommes regardèrent leur camarade avec admiration. Sirdey lui-même fut gagné.

— Comme ça !… murmura-t-il à bout d’arguments contraires. Il se ravisa.

— Sapristi ! s’écria-t-il. Nous parlons de poudre comme si nous en avions.

— Il y en a dans l’entrepôt, répliqua Dorick. Nous n’avons qu’à la prendre.

— Tu en parles à ton aise !… riposta Sirdey qui jouait décidément le rôle de l’opposition. Avec ça que c’est commode !… Qui est-ce qui se chargera de la besogne ?

— Pas moi, dit Dorick.

— Naturellement ! approuva Sirdey d’un ton railleur.

— Non, expliqua Dorick, je ne suis pas assez fort. Pas toi non plus : tu es trop poltron. Et pas davantage Fred Moore ni William : ils sont trop brutaux et trop maladroits.

— Qui, alors ?

— Kennedy.

Personne ne fit d’objection. Oui, Kennedy, ancien matelot, leste, débrouillard, habile de ses doigts, apte à tous les métiers, pouvait réussir là où d’autres échoueraient. Le choix de Dorick était bon.

Celui-ci interrompit leurs réflexions.

— Voilà qu’il se fait tard, dit-il ; si vous voulez, rendez-vous ici demain à la même heure. Kennedy sera là. Nous nous expliquerons, et nous conviendrons de tout. »

En approchant des premières maisons, ils estimèrent prudent de s’écarter les uns des autres, et, le lendemain, ils prirent une précaution semblable pour se rendre à l’endroit convenu. Chacun sortit de la ville isolément, et c’est seulement quand ils furent hors de vue qu’ils laissèrent peu à peu décroître les distances qui les séparaient.

Ils étaient cinq, ce soir-là, Kennedy, averti par Dorick, s’étant joint au quatuor.