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Page:Verne - Un drame en Livonie, illust Benett, 1905.djvu/137

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à l’université de dorpat.

pas explosion, mon camarade, car nous aurons eu soin de les noyer dans le Champagne ! »

C’était la raison même qui inspirait cette réponse de la plus sage de ces jeunes têtes. Mais les autres étaient montées… Suivraient-elles ces conseils de prudence ?… Comment la journée se terminerait-elle ?… Ce festival ne serait-il pas l’occasion d’un désordre ?… Si les provocations ne venaient pas du côté slave, ne viendraient-elles pas du côté allemand ?… On devait le craindre.

Aussi ne s’étonnera-t-on pas que le recteur de l’Université eût conçu de très sérieuses inquiétudes. Depuis quelque temps, il ne l’ignorait point, la politique, ou tout au moins cette lutte du slavisme et du germanisme tendait à s’accentuer dans le monde des étudiants.

La très grande majorité entendait maintenir à l’Université les traditions, les idées qui dataient de son origine.

Le gouvernement savait qu’il y avait là un ardent foyer de résistance aux tentatives de russification dont les provinces Baltiques étaient menacées. Prévoyait-on quelles seraient les conséquences de troubles qui se produiraient à cette occasion ?… Il convenait d’y prendre garde. Si ancienne, si respectable que fût l’Université de Dorpat, elle n’était pas à l’abri d’un ukase impérial, en cas qu’elle devînt le centre d’une agitation contre le mouvement panslaviste. Le recteur observait donc de très près ces dispositions des étudiants. Les professeurs, bien qu’ils fussent tous acquis aux idées allemandes, les redoutaient aussi… Peut-on dire où s’arrêterait cette jeunesse, lancée dans les luttes de la politique ?…

En réalité, quelqu’un, ce jour-là, eut plus d’influence que le recteur. Ce fut Jean Nicolef. Si le recteur n’avait pu obtenir que Karl Johausen et ses amis renonçassent à exclure du banquet Jean et ses camarades, celui-ci obtint de Gospodin et des autres