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Page:Verne - Un drame en Livonie, illust Benett, 1905.djvu/255

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sur une tombe.

— Je vous promis de vous aimer toujours… Mes sentiments ont-ils changé ?…

— Pas plus que les miens pour vous, Wladimir, et, si l’autorisation m’en eût été accordée, je vous aurais rejoint là-bas, et je serais devenue votre femme…

— La femme d’un condamné, Ilka…

— La femme d’un exilé, Wladimir », répondit la jeune fille.

Wladimir sentit bien la pensée que signifiait cette réponse.

Mais il ne voulut pas s’y attacher, et reprenant :

« Eh bien, dit-il, ce n’est pas vous, Ilka, qui avez eu à aller là-bas pour être ma femme… Les circonstances se sont modifiées, et c’est moi qui suis venu ici pour être votre mari…

— Vous avez raison de dire que les circonstances se sont modifiées, Wladimir… oui !… horriblement ! »

Ilka prononça ce dernier mot avec une telle expression de douleur que tout son corps en tremblait.

« Chère Ilka, reprit Wladimir, quelque cruel souvenir qu’il doive vous rappeler, j’ai voulu avoir un entretien avec vous… Je ne le prolongerai pas… Je viens seulement vous demander de tenir vos promesses…

— Mes promesses, Wladimir, répondit Ilka qui ne pouvait contenir les sanglots dont sa poitrine était pleine, mes promesses ?… Quand je les ai faites, j’étais digne de les faire… Aujourd’hui…

— Aujourd’hui, Ilka, vous êtes toujours digne de les tenir !

— Non, Wladimir, et il faut oublier les projets que nous avions formés.

— Vous saviez bien que je ne les oublierais jamais ! Ne seraient-ils pas réalisés depuis quinze jours, ne serions-nous pas l’un à l’autre, sans le malheur qui s’est produit à la veille de notre mariage ?…

— Oui, répondit Ilka avec résignation, et Dieu soit loué que