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Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/263

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besoin de le dire ? la poésie des détails, sauf aussi un morceau d’une âpre couleur, que l’auteur a tiré d’une autre romance, une des plus anciennes du Romancero, où le futur mari de Chimène nous apparaît bien différent du héros qui, chez Corneille, soupire les fameuses stances :


« Ô roi ! je vis dans le chagrin, dans le chagrin vit ma mère. Chaque jour qui luit je vois celui qui tua mon père, chevalier à cheval, et tenant en sa main un épervier, ou parfois un faucon qu’il emporte pour chasser ; et pour me faire plus de peine il le lance dans mon colombier. Avec le sang de mes colombes il a ensanglanté mes jupes… Il m’a tué un petit page sous les pans de mes jupes. Un roi qui ne fait point justice ne devrait point régner, ni chevaucher à cheval, ni chausser des éperons d’or, ni manger pain sur nappe, ni se divertir avec la reine, ni entendre la messe en un lieu consacré, parce qu’il ne le mérite pas ![1] »


Il y a plus d’originalité dans l’Accident de don Iñigo. Mais Leconte de Lisle a-t-il été bien inspiré en s’écartant autant de son modèle ?

La romance imitée par lui est celle que le traducteur du Romancero intitule Comment Diègue Laynez se rendit à Burgos, accompagné de ses gentilshommes, et comment le Cid refusa de baiser la main du roi.

Diègue Laynez va à cheval baiser la main au bon roi. Il emmène avec lui ses trois cents gentilshommes. Rodrigue est parmi eux. Ils rencontrent les gens du roi qui devisent


  1. Damas Hinard, t. II, p. 20, Chimène vient de nouveau porter sa plainte au roi.