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Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/279

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Les pivots sont Taaora ; les rochers sont Taaora ; les sables sont Taaora ; c’est ainsi que lui-même s’est nommé. Taaora est la clarté : il est le germe : il est la base ; il est l’incorruptible, le fort qui créa l’univers, l’univers grand et sacré qui n’est que la coquille de Taaora. C’est lui qui le met en mouvement et en fait l’harmonie.


Mœrenhout lut et relut ce singulier écrit. Il était « ébloui », écrit-il dans son Journal, dont son livre reproduit un long fragment ; il était « dans l’enthousiasme », tant il était loin de s’attendre à trouver dans ces îles une aussi sublime poésie. Désireux d’en savoir davantage, il partit sans retard pour voir le prêtre de Raïatéa.

Il fut admirablement reçu. L’indigène, comprenant qu’on l’interrogeait sur ses croyances avec sympathie, et non pour s’en moquer, ne fit aucune difficulté à les faire connaître. Mais son auditeur eut beaucoup de peine à les recueillir, car le vieillard ne pouvait réciter qu’en déclamant er sans s’interrompre ; dès qu’on l’arrêtait pour écrire, il ne savait plus rien, il ne pouvait poursuivre, il devait tout recommencer, et ces répétitions, en le fatiguant, lui brouillaient la mémoire. Il fallut plusieurs séances à Mœrenhout pour transcrire tout ce qu’il avait entendu.

Ainsi instruit par les confidences de l’ancien prêtre de Raïatéa, il put donner dans son volume les indications les plus précieuses sur les croyances et sur le culte des Polynésiens : sur leurs temples ; — sur le cérémonial des sacrifices humains ; — sur l’origine et l’organisation des Aréoïs, association d’initiés, qui rendaient, à ce qu’il semble, un culte au soleil, tenaient le peuple sous leur domination et