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Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/316

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Créuse.

Je te plains à mon tour, ô étranger.

Ion.

Oui, car je ne connais ni quelle mère m’a donné le jour, ni de quel père je suis né.


Cette mutuelle sympathie ayant éveillé la confiance de Creuse, elle fait à Ion d’une façon détournée l’aveu de son aventure : elle lui révèle la violence du dieu en feignant que la victime en ait été une de ses amies, et le jeune homme écoute avec curiosité, avec émotion, cette histoire d’un enfant abandonné comme il l’a été lui-même ; il plaint « la pauvre mère » dont on lui parle et qui le fait songer à la sienne :


Ion.

Hélas ! comme cette destinée se rapporte à mon infortune !

Créuse.

Toi aussi, étranger, je suppose que tu regrettes ta malheureuse mère.

Ion.

Ah ! ne réveille pas en mon cœur une douleur que j’avais oubliée.


Alors, Ion fait sur le compte du ravisseur une de ces réflexions irrévérencieuses dont les personnages d’Euripide sont assez coutumiers à l’égard de la divinité. Comme la jeune femme voudrait consulter Apollon sur le sort de son fils, il douté quelle obtienne une réponse :


Il y a dans ton cas une circonstance malheureuse : comment le dieu répondra-t-il sur un fait qu’il veut tenir caché ? Se lais-