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Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/73

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La Mâyâ dans mon sein bouillonne en fusion,
Dans son prisme changeant je vois tout apparaître ;
Car ma seule Inertie est la source de l’Être :
La matrice du monde est mon Illusion.

C’est Elle qui s’incarne en ses formes diverses,
Esprits et corps, ciel pur, monts et flots orageux,
Et qui mêle, toujours impassible en ses jeux,
Aux sereines vertus les passions perverses.


Ayant ainsi répondu à Brahma, par la bouche de Bhagavat, que la souffrance est, comme le ciel, les corps, les monts et les flots, une illusion, Leconte de Lisle lui conseille de ne plus interroger l’Auguste Vérité : car alors, que serait-il, sinon la propre vanité de Bhagavat


Et le doute secret de son néant sublime ?


On pensera sans doute que ce mot de la fin est trop spirituel pour ne pas être purement français. Cependant peut-être a-t-il été inspiré par un mot de Vidura qui, après avoir si bien appris du sage Maîtreyâ ce qu’est Bhagavat, dit ingénieusement au dieu :


« Reconnaissant qu’il n’y a rien de réel dans ce qui n’est pas l’Esprit, et que c’est seulement le fruit d’une opinion vaine, j’écarte jusqu’à cette opinion par le culte que je rends à tes pieds[1]. »


On n’aurait pas tout dit sur les sources de la Vision de Brahma, si l’on ne faisait pas observer combien ce poème

    comme le théâtre de la Mâyâ de Hâri, de cette illusion dont l’Esprit est le jouet ; cet état est sans réalité, sans base ; l’origine de l’univers n’est pas hors de là. » Liv. III, ch. VIII, v. 9-10, 16.

  1. Liv. III, ch. VIII, v. 18.