Page:Viard - Grandes chroniques de France - Tome 9.djvu/306

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui estoit rompu, et cil qui l’avoit oy et veu, si le tesmoigna, car nous veismes à l’eglise de Saint Denis et en la sale où le roy estoit, i homme qui se disoit avoir esté pris des anemis et puis rançonné, lequel disoit en appert et publiquement, pour l’onneur du roy et du royaume, que le roy d’Angleterre faisoit faire moult diligeaument le pont de Poyssi, et vouloit celui homme recevoir mort s’il ne disoit vérité. Mais les nobles et les chevaliers et les plus prochains du roy li disoient qu’il mentoit apertement, et se moquierent de lui comme d’un povre homme. Hélas ! adonc fu bien verifiée celle parole qui dit ainsi : « Le povre a parlé et l’en li a dit : qui est cestui ? par moquerie. Le riche a parlé et chascun se teust pour reverence de lui. » Finablement, quant il fu sceu veritablement que l’en refaisoit le pont, l’en y envoia la commune d’Amiens[1] pour empeeschier la besoigne ; laquelle ne pot resister à la grant multitude des saiettes que les Anglois traioient, et fu toute mise à mort. Et tandis que le roy estoit à Antoigny, en ycelle nuit li vindrent nouvelles que les Anglois, pour certain avoient refait le pont de Poyssi et que le roy d’Angleterre s’en devoit aler et passer par ylec.


XXXVIII.
Comment le roy d’Angleterre se parti de Poyssi et mist le feu par touz les manoirs royaux et s’enfui vers Picardie ; et comment le roy de France s’en retourna d’Antoigny et passa par Paris disant a grans sous-
  1. Ce fut le 13 août qu’eut lieu cette attaque des hommes de la commune d’Amiens (J. Viard, op. cit., p. 49).