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Page:Victor Baudot - Au Pays des Peaux-Rouges.djvu/176

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MONOGRAPHIES INDIENNES.

servir de cercueils  ; cependant ils n’aiment pas à être ensevelis sous terre : voilà pourquoi bien peu nous amènent leurs morts. Presque toujours, les Pieds-Noirs se contentent de déposer le cercueil sur le sol et le laissent là sans autre cérémonie.

D’autres construisent une cabane en bois sans toiture, sur une haute colline. Cette case carrée a cinq mètres de large et deux mètres et demi de haut. On y entasse les morts de tout le voisinage : on place les cercueils les uns sur les autres avec quelques objets ayant appartenu aux défunts : pour un homme, ce sera son sac de médecine, sa selle, etc. ; pour une femme, quelque objet de ménage, une poêle, des assiettes, des cuillers etc. ; pour un enfant, ses jouets, comme de petites voitures, et ainsi de suite. Une fois j’y ai vu mener le cheval du défunt, orné de rubans  ; après avoir déposé le cadavre, on tua le cheval d’un coup de fusil. L’opinion commune des blancs est que les Indiens déposent ces objets sur les cercueils et tuent des chevaux pour que les morts s’en servent dans l’autre vie.

Dernièrement, mourut un enfant de cinq ans qui était baptisé et fut enterré dans notre cimetière. Le père de l’enfant prit un coffre et le remplit des habits et de tout ce qui avait appartenu au mort et le déposa sur la tombe. Quand cet homme se fut un peu consolé, il vint me voir et je lui demandai pourquoi il avait mis ce coffre sur la tombe de son fils, s’il croyait que celui-ci en ferait usage, le priant de m’expliquer la croyance indienne sur ce point. L’Indien, nommé «  Mille Chevaux  », homme très intelligent, répondit qu’ils agissent ainsi pour montrer leur désintéressement vis-à-vis des choses appartenant à leurs morts. Nous savons, ajouta-t-il, que le défunt aimait beaucoup ces objets, et nous les détruisons pour que personne ne s’en serve après lui.