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Page:Victor Baudot - Au Pays des Peaux-Rouges.djvu/79

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UNE PAROISSE AMÉRICAINE

de me retourner pour m’assurer que je n’étais point seul. Après l’évangile je montai en chaire et lus la lettre de l’évêque qui me nommait recteur de l’église Saint-Jean-Baptiste de Frenchtown  ; puis je saluai mes nouveaux paroissiens, leur lis quelques recommandations, entre autres de m’avertir à temps quand ils auraient des malades en danger de mort, et de me présenter les enfants en âge de faire leur première communion. Je leur déclarai ensuite qu’il n’y avait pas un sou en caisse, le seul argent disponible ayant été récemment dépensé par mon prédécesseur pour l’achat d’un très beau corbillard. Pendant l’offertoire, les syndics, selon l’usage, firent la quête et recueillirent quelques dollars. Qu’est-ce que les syndics  ? me demanderez-vous. Les syndics sont quelque chose comme nos marguilliers, mais avec plus de prestige. Ils forment le conseil du curé, la seule autorité reconnue dans ces communautés canadiennes, organisées en paroisses où il n’y a ni maire, ni adjoints. Ils sont au nombre de trois, nommés par l’assemblée paroissiale et se renouvellent d’année en année par un roulement continu, le plus ancien cédant la place à un nouveau. Chaque famille a son banc  ; la location des bancs est le principal revenu du curé  ; les plus rapprochés de l’autel se louent 20 dollars ou 100 fr. ; les plus éloignés, 6 dollars ou 30 fr.

La sortie de l’église offre chaque dimanche une scène très animée  ; on s’aborde, on s’interroge, on se communique les nouvelles des différents points de la vallée  ; les voitures rangées en longues files attendent  ; après quelques instants, chaque famille reprend la sienne et fouette cocher  ! on rentre au logis.

Les offices du dimanche sont terminés après la messe et la bénédiction du saint Sacrement qui la suit  ; on comprend en effet qu’il est presque impossible de faire reve-