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Page:Victor Devogel - Légendes bruxelloises, 1903.pdf/91

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LÉGENDES BRUXELLOISES

faite. D'une part, joie pour ceux qui revoyaient un père, un époux, un fils. D'autre part, douleur pour ceux qui apprenaient la triste nouvelle de la mort de leurs proches.

En général, la gaieté était grande. Ils étaient donc là, ces vaillants qui avaient tout quitté pour s'en aller au loin combattre les infidèles ! Que de choses ils avaient vues ! De combien de faits n'avaient-ils pas été témoins ! Que d'histoires à raconter le soir à la veillée ! Et les questions se pressaient sur les lèvres. On ne leur laissait pas le temps de réfléchir. L'impatience était énorme, la curiosité intense ; la soif de savoir n'avait plus de bornes.

Ce fut fête le soir dans bien des familles et l'on imagine aisément l'allégresse dans laquelle chacun était plongé. Les festins durèrent tard et l'on raconte qu'ils se terminèrent par un fait assez singulier.

Chaque femme se vit dans l'obligation de devoir transporter son mari de la table au lit. Les hommes avaient complètement perdu la tête. Les femmes seules — chose rare, on l'avouera — avaient conservé leur présence d'esprit, leur calme. Les rôles étaient renversés. Elles possédaient seules la force à ce moment ; elles étaient maîtresses au logis et dignes de l'être.