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Page:Vigny - Œuvres complètes, Poésies, Lemerre, 1883.djvu/25

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Lorsque son front perça le nuage de Dieu
Qui couronnait d’éclairs la cime du haut lieu,
L’encens brûla partout sur les autels de pierre,
Et six cent mille Hébreux, courbés dans la poussière,
À l’ombre du parfum par le soleil doré,
Chantèrent d’une voix le cantique sacré ;
Et les fils de Lévi, s’élevant sur la foule,
Tels qu’un bois de cyprès sur le sable qui roule,
Du peuple avec la harpe accompagnant les voix,
Dirigeaient vers le ciel l’hymne du Roi des Rois.


Et, debout devant Dieu, Moïse ayant pris place,
Dans le nuage obscur lui parlait face à face.
Il disait au Seigneur : « Ne finirai-je pas ?
Où voulez-vous encor que je porte mes pas ?
Je vivrai donc toujours puissant et solitaire ?
Laissez-moi m’endormir du sommeil de la terre. —
Que vous ai-je donc fait pour être votre élu ?
J’ai conduit votre peuple où vous avez voulu.
Voilà que son pied touche à la terre promise,
De vous à lui qu’un autre accepte l’entremise,
Au coursier d’Israël qu’il attache le frein ;
Je lui lègue mon livre et la verge d’airain.