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Page:Vigny - Héléna, 1822.djvu/10

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héléna

Qui calment la tempête, et donnent du courage
À ceux que les méchants tiennent en esclavage :
Ainsi l’hymne nocturne à l’étoile des mers
Couronnait de repos le soir des jours amers.
Sitôt que de Zea, de Corinthe et d’Alcime,
La lune large et blanche avait touché la cime,
Et douce aux yeux mortels, de ce ciel tiède et pur
Comme une lampe pâle illuminait l’azur ;
Il s’élevait souvent une brise embaumée,
Qui, telle qu’un soupir de l’onde ranimée,
Aux rives de chaque île apportait à la fois
Et l’encens de ses sœurs et leurs lointaines voix.
Tout s’éveillait alors : on eût dit que la Grèce
Venait de retrouver son antique allégresse,
Mais que la belle esclave, inquiète du bruit,
N’osait plus confier ses fêtes qu’à la nuit.
Les barques abordaient en des rades secrètes,
Puis, des vallons fleuris choisissant les retraites,
Des danseurs, agitant le triangle d’airain,
Oubliaient le sommeil au son du tambourin,
Oubliaient l’esclavage auprès de leurs maîtresses
Qui de leurs cheveux blonds nouaient les longues tresses