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Page:Vigny - Héléna, 1822.djvu/132

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« Heureux, trois fois heureux celui que Dieu corrige !
« Gardons de repousser les peines qu’il inflige :
« Voici l’heure où vos maux vous seront précieux ;
« Il vous a préparé lui-même pour les Cieux.
« Oubliez votre corps, ne pensez qu’à votre âme ;
« Dieu lui-même l’a dit : L’homme né de la femme[1]
« Ne vit que peu de temps, et c’est dans les douleurs.
« Ce monde n’est que vide et ne vaut pas des pleurs !
« Qu’aisément de ses biens notre âme est assouvie !
« Me voilà, comme vous, au bout de cette vie :
« J’ai passé bien des jours, et nia mémoire en deuil
« De leur peu de bonheur n’est plus que le cercueil.
« C’est à moi d’envier votre longue souffrance,
« Qui d’un monde plus beau vous donne l’espérance ;
« Les anges à vos pas ouvriront le saint lieu :
« Pourvu que vous disiez un mot à votre Dieu,
« Il sera satisfait. » Ainsi, dans sa parole,
Mêlant les saints propos du livre qui console,
Le vieux prêtre engageait le mourant’à prier,
Mais en vain : tout à coup on l’entendit crier,

  1. Job. Chap. XIV, V. 1.