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Page:Vigny - Héléna, 1822.djvu/154

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Sur mes mains ma tête penchée
Croit trouver l’innocent sommeil.
Mais, hélas ! elle m’est cachée,
Sa fleur au calice vermeil.
Pour toujours elle m’est ravie,
La douce absence de la vie,
Ce bain qui rafraîchit les jours ;
Cette mort de l’âme affligée
Chaque nuit à tous partagée,
Le sommeil m’a fui pour toujours !

Ah ! puisqu’une éternelle veille
Brûle mes yeux toujours ouverts,
Viens, ô Gloire ! ai-je dit, réveille
Ma sombre vie au bruit des vers.
Fais qu’au moins mon pied périssable
Laisse une empreinte sur le sable.
« La Gloire a dit : Fils de douleur,
« Où veux-tu que je te conduise ?
« Tremble, si je t’immortalise,
« J’immortalise le malheur. »