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Page:Vigny - Héléna, 1822.djvu/89

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Mais elle : « Ô mon amant ! compagnon de ma vie !
Des foyers maternels si ton char m’a ravie
Tremblante, mais complice, et si nos vœux sacrés
Ont fait luire à l’Hymen des feux prématurés,
Par cette sainte amour nouvellement jurée,
Par l’antique Vesta, par l’immortelle Rhée
Dont j’embrasse l’autel, jamais nulle autre ardeur
De mes pieux sermens n’altéra la candeur ;
Non, jamais Pénélope à l’aiguille pudique,
Plus chaste n’a vécu sous la foi domestique,
Pollion, quel est-il ? » — « Je tiens tes longs cheveux…
Je dédaigne tes pleurs et tes tardifs aveux,
Corinne, tu mourras… » — « Ce n’est pas moi, ma mère,
Il ne m’a point aimée, si ta sainte colère
À comme un Dieu vengeur poursuivi nos amours !
Que n’ai-je cru ma mère, et ses prudens discours !
Je ne détourne plus ta sacrilège épée ;
Tiens, frappe, j’ai vécu, puisque tu m’as trompée.
Ah ! cruel… mon sang coule… Ah ! reçois mes adieux,
Puisses-tu ne jamais t’éveiller ! » — « Justes Dieux ! »