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Page:Vigny - Stello ou Les diables bleus, 1832.djvu/167

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vous ayez hérité du dédain monarchique, moins sa grâce héréditaire et plus votre grossièreté élective ?

Oui, noir et trop véridique Docteur ! oui, ils sont ainsi. — Ce qu’il faut au Poète, dit l’un, c’est trois cents francs et un grenier ! — La misère est leur Muse, dit un autre. — Bravo ! — Courage ! — Ce rossignol a une belle voix ! crevez-lui les yeux, il chantera mieux encore ! l’expérience en a été faite. Ils ont raison, vive Dieu !

« Triple divinité du ciel ! que t’ont-ils donc fait, ces Poètes que tu créas les premiers des hommes, pour que les derniers des hommes les renient et les repoussent ainsi ? »

Stello parlait à peu près de la sorte en marchant. Le Docteur tournait la pomme de sa canne sous son menton et souriait.

« Où se sont envolés vos diables bleus ? » dit-il.

Le malade s’arrêta. Il ferma les yeux et sourit aussi, mais ne répondit pas, comme s’il n’eût pas voulu donner au Docteur le plaisir d’avouer sa maladie vaincue.

Paris était plongé dans le silence du sommeil, et l’on n’entendait au-dehors que la voix