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Page:Vigny - Stello ou Les diables bleus, 1832.djvu/32

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on ne lui avait dit autre chose en commençant, et il en avait assez, sachant que la fin était toujours la même. Voyez quel fatigant dialogue : « Ah ! Sire, croyez-vous que Dieu me pardonne jamais ? — Eh ! ma belle, cela n’est pas douteux : il est si bon ! — Et moi, comment pourrais-je me pardonner ? — Nous verrons à arranger cela, mon enfant, vous êtes si bonne ! — Quel résultat de l’éducation que je reçus à Saint-Cyr ! — Toutes vos compagnes ont fait de beaux mariages, ma chère amie. — Ah ! ma pauvre mère en mourra ! — Elle veut être Marquise, elle sera Duchesse avec le tabouret. — Ah ! Sire, que vous êtes généreux ! Mais le ciel ! — Il n’a jamais fait si beau que ce matin depuis le Ier de juin. »

Voilà qui eût été insupportable. Mais avec mademoiselle de Coulanges, rien de semblable : douceur parfaite… c’était la plus naïve et la plus innocente des pécheresses ; elle avait un calme sans pareil, un imperturbable sang-froid dans son bonheur, qui lui semblait tout simplement le plus grand qui fût au monde. Elle ne pensait pas une fois dans la journée ni à la veille ni au lendemain, ne s’informait jamais des maîtresses qui l’avaient précédée, n’avait pas l’ombre de