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Page:Vigny - Stello ou Les diables bleus, 1832.djvu/411

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d’azur et d’or tel qu’on le voit au Caire, pur de toute légère et imperceptible vapeur, ne serait pas une toile assez large pour servir de fond à leurs portraits.

Levez les yeux à ce plafond et figurez-vous y voir monter ces fantômes mélancoliques : Torquato Tasso, les yeux brûlés de pleurs, couvert de haillons, dédaigné même de Montaigne (ah ! philosophe, qu’as-tu fait là !), et réduit à n’y plus voir, non par cécité, mais… Ah ! je ne le dirai pas en français ; que la langue des Italiens soit tachée de ce cri de misère qu’il a jeté :

Non avendo candella per escrivere i suoi versi ;

Milton aveugle, jetant à un libraire son Paradis perdu pour dix livres sterling ; — Camoëns recevant l’aumône à l’hôpital des mains de ce sublime esclave qui mendiait pour lui sans le quitter ; — Cervantès tendant la main de son lit de misère et de mort ; — Lesage en cheveux blancs, suivi de sa femme et de ses filles, allant demander un asile, pour mourir, à un pauvre chanoine, son fils ; — Corneille manquant de