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Page:Villemain - Cours de littérature française, tome 1.djvu/16

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dionale et de l’Espagne. Plus tard, de curieux monuments attestent, dans les assemblées provinciales des Gaules, l’emploi de la langue latine pour diriger les actes, exposer les plaintes des sujets gaulois, et même quelquefois accuser[1] le préfet romain. C’était en langue latine que se produisait tout l’esprit du pays.

Il est à croire qu’une altération dans cet état des provinces conquises par les Romains ne date que de l’invasion de nouvelles races barbares. Qu’arrive-t-il alors ? De même que Rome civilisée avait imposé sa langue à tous les peuples qu’elle soumettait par ses armes, les nouveaux conquérants renversèrent-ils la civilisation récente qui venait d’être élevée dans les Gaules, et mirent-ils leurs mœurs et leur langue à la place de celles que les Romains avaient en partie substituées aux usages et à l’ancien idiome du pays ? Non ! et c’est là qu’apparaît la force de la civilisation. Un savant célèbre, dans un ouvrage sur les langues ouigour, a ingénieusement établi que, dans la langue d’un peuple formé par des agrégations diverses, on retrouve la population primitive de chacune des races réunies, en évaluant la quantité de mots et de

  1. Raynouard, Droit municipal, t. i p. 208.