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Page:Villemain - Cours de littérature française, tome 1.djvu/96

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Je m’arrête, Messieurs. Quelque chose de plus important que l’article et un attribut particulier des langues modernes, c’est l’emploi du verbe être et du verbe avoir, usités comme auxiliaires. La plus grande révolution qui se soit opérée dans la syntaxe, depuis les Grecs et les Romains, consiste dans ce double procédé. On ne peut nier, cependant, que le principe ne s’en trouve dans la forme même de ces langues antiques. Non-seulement le verbe avoir, mais l’acception singulière qu’il a prise dans nos langues modernes dérive du latin : elle y était rare, peu apparente, peu nécessaire, suppléée par d’autres modifications ingénieuses et variées ; elle y était cependant. On a remarqué plusieurs phrases latines où le verbe habere, construit avec un participe, a précisément la même place et la même force que le verbe avoir dans nos langues modernes. Urbem quam parte captam, parte dirutam habet, disait Tite-Live : « La ville qu’il a prise en partie, en partie détruite. » — Prœmisit omnem equitatum quem ex omni provincia coactum habebat : « Il fit partir en avant la cavalerie qu’il avait rassemblée de toute la province. » Et si l’on conteste sur ces exemples, où habere pourrait être remplacé par le verbe tenere, il en est d’autres de plus précis encore, de plus littéralement